Quiconque a déjà fait un long voyage avec des enfants (ou des personnes impatientes) redoute sans cesse d’entendre la satanée question : « Est-ce qu’on arrive bientôt? ». Elle peut être posée n’importe quand au cours du voyage, une seule fois ou toutes les 30 secondes, et elle est souvent suivie d’une longue litanie de plaintes ou de gémissements. En ce début de la troisième année de pandémie de COVID, la planète entière s’est souvent demandé si on arrivait à la fin bientôt. Nous avons été doublement vaccinés, nous avons reçu une dose de rappel, nous avons respecté la distanciation, porté des masques, été confinés et avons subi des tests. Nous avons appris l’alphabet grec et nous en savons plus au sujet de la dénomination des variants que nos professeurs de biologie du secondaire ne l’auraient cru possible. Nous avons passé des étés ennuyeux et des hivers qui semblaient interminables. Et pendant tout ce temps, nous nous sommes demandés si nous arriverions bientôt au bout de nos peines.
Je crois que c’est au printemps de 2022 que nous arriverons enfin à notre destination post-COVID. Nous cesserons de porter des masques. Nous pourrons de nouveau embrasser des personnes de l’extérieur de notre bulle. Nous pourrons aller en boîte et danser. Mais nous pourrons aussi réintégrer nos bureaux. Nous pourrons nous asseoir à côté de collègues. Nous pourrons tenir des rencontres en personne avec des clientes et clients.
J’y réfléchis beaucoup dernièrement, et à ce que cela comportera non seulement pour nos membres de l’Atlantique mais aussi pour ceux de tout le Ministère. J’ai toujours dit que la COVID-19 avait provoqué bon nombre de changements positifs – elle a obligé ACC à porter enfin notre réseau à un niveau fiable, éliminé bon nombre de procédures inutiles fondées sur la tradition plutôt que sur les besoins et révélé que les fonctions de presque tous les emplois d’ACC pouvaient être remplies à distance – mais elle a aussi eu une foule de conséquences négatives, la crise de la santé mentale qui y est associée n’en étant qu’une. C’est une pandémie de troubles de santé mentale que nous vivrons encore pendant des années, sinon des décennies. Et c’est sur la crise de la santé mentale que notre syndicat doit mettre l’accent s’il veut bien représenter ses membres et ne pas être écrasé sous une montagne de griefs visant des « mesures disciplinaires ».
Cependant, nous vivons dans un monde qui tourne sans cesse, parfois un peu trop vite. Depuis que j’ai écrit les mots précédents, il y a moins d’une semaine, nous sommes passés de l’espoir d’une fin de la COVID à une invasion illégale et immorale de l’Ukraine par la fédération de Russie. Nous risquons quotidiennement de voir le conflit déborder dans les pays voisins membres de l’OTAN et nous plonger dans une nouvelle guerre mondiale. Pareille calamité aurait des répercussions massives sur notre pays et notre Ministère – une guerre de cette envergure obligerait nos membres à traiter un nombre massif de demandes de prestations d’invalidité et de décès et causerait un cauchemar physique et psychologique à l’échelle mondiale.
Champion de la santé mentale
À titre de champion de la santé mentale du SEAC, j’ai été très occupé depuis notre congrès. Je suis heureux d’annoncer que j’ai d’excellentes relations avec Jill Turner, conseillère en RH du Ministère chargée de la santé mentale. Jill et moi tenons des réunions mensuelles programmées pour nous tenir l’un l’autre au courant des projets en santé mentale auxquels nous participons séparément ou ensemble. Les projets conjoints comprennent les suivants :
- Comité mixte du Conseil du Trésor et de l’AFPC sur les mécanismes de soutien en santé mentale
Au cours du tour de négociation le plus récent, l’AFPC et le CT ont signé un protocole d’entente (Convention PA, annexe R, page 164 en anglais et 174 en français) qui reconnaît que certains membres du groupe PA travaillant pour certains ministères risquent beaucoup plus que les autres d’être exposés à des traumatismes. ACC est l’un de ces ministères. Le Comité a été chargé 1) de déterminer les postes comportant des risques d’exposition à des traumatismes et 2) de répertorier les mécanismes de soutien du ministère en santé mentale, qu’il s’agisse de programmes de formation ou de pratiques ou politiques opérationnelles. Pour nous aider à ces fins, nous avons créé un sous-comité mixte d’ACC sur la santé mentale qui comprend des personnes représentant SEAC et un gestionnaire de chaque Direction.
Bien que certains postes comportent de toute évidence un risque d’exposition à des traumatismes (ceux des gestionnaires de cas, par exemple), notre étude en a révélé d’autres où le risque est moins évident (p. ex., ceux des conseillères ou conseillers de l’AIPRP). Jusqu’à présent, nous avons relevé 96 titres de postes d’ACC qui comportent au moins un certain risque d’exposition à des traumatismes – soit beaucoup plus que nous ne l’aurions cru!
Nous répertorions les ressources en santé mentale des différentes Directions et Divisions du Ministère. Nous les évaluons pour déterminer si elles sont destinées à servir à la prévention, à l’intervention en cas d’incident ou au soutien à long terme et pour recueillir une douzaine d’autres points de données exigées par le comité national.
Jill et moi avons convenu que le travail de notre comité ne portera pas uniquement sur les données exigées par le comité national. Nous prévoyons collaborer avec le Centre d’expertise pour la santé mentale en milieu de travail à l’établissement d’un outil d’évaluation des risques pour la santé mentale permettant de quantifier le risque d’exposition à des traumatismes que comporte chacun des 96 postes relevés. De plus, nous emploierons notre liste des mécanismes de soutien pour procéder à une analyse des lacunes afin de déterminer les secteurs où les ressources sont insuffisantes.
- Leadership informé sur les traumatismes
En juin 2021, des personnes représentant le SEAC et ACC ont suivi un cours intitulé Leadership informé sur les traumatismes. Les retours ont été mitigés. Malgré cela, la formation a eu bon nombre de résultats positifs. En décembre 2021, les DEN du SEAC ont suivi un deuxième cours, placé sous le thème du « Leadership syndical informé sur les traumatismes » et donné par un autre fournisseur. Celui-ci était une personne ayant travaillé à ACC en tant que gestionnaire de cas avant de passer au secteur privé, et il a pu adapter le cours aux réalités d’ACC et du travail du SEAC. En janvier 2021, Jill et plusieurs membres du personnel des RH d’ACC avaient suivi un cours d’initiation aux approches tenant compte des traumatismes donné par le Centre canadien d’innovation pour la santé mentale en milieu de travail (CCISMMT) que l’employeur a trouvé bien meilleur que le cours de juin 2021.
Jill et moi collaborons à l’établissement d’un programme à deux niveaux concernant le leadership informé sur les traumatismes à l’intention de tous les gestionnaires et les membres du personnel d’ACC. Le premier niveau sera le cours du CCISMMT destiné à donner des connaissances de base sur les traumatismes et la façon dont ils peuvent être causés par des événements survenant au travail ou se présenter en milieu de travail. Le deuxième niveau sera un cours propre à ACC qui sera axé sur les techniques de prévention et d’intervention et les meilleures pratiques. Nous espérons que ce programme de formation devienne un élément obligatoire de tous les plans d’apprentissage des gestionnaires et qu’il aide à faire passer l’accent de la discipline au soutien.
- Priorités du SEAC en matière de santé mentale
En juin 2020, le SEAC a présenté à l’employeur une liste comprenant 25 actions recommandées divisées en 6 groupes selon l’ordre de priorité. Il s’agissait de répondre aux besoins en santé mentale les plus pressants du Ministère. Des progrès ont été réalisés à certains égards mais le Ministère n’a pas encore répondu officiellement à nos priorités. Depuis des mois, il répond à toutes nos demandes de renseignements qu’il attend les commentaires d’une direction ou d’une autre ou que sa réponse doit être examinée par un intervenant quelconque mais pas qu’elle a été confiée au sous-ministre pour qu’il y donne suite. Cela indique malheureusement le peu d’importance que le Ministère accorde à la santé mentale en milieu de travail. Même si des données recueillies au fil de plusieurs années indiquent un besoin critique d’action pressante à de nombreux égards ayant trait à la santé mentale, le Ministère préfère faire l’autruche et se comporter comme si tout allait bien. En ma qualité de champion de la santé mentale du SEAC, je continue à inciter le Ministère à toutes les occasions possibles à prendre des mesures pour faire de la santé mentale une priorité.
Cela étant dit, nous avons réalisé certains progrès. Le 1er avril 2022, la revendication prioritaire du SEAC visant l’élimination des limites de durée d’appel sera mise en œuvre dans tous les centres du RNCC d’ACC. Cela supprimera un facteur de stress du personnel du RNCC, lui donnant le temps nécessaire pour fournir les services de qualité dont nos vétérans ont besoin sans se sentir pressé de mettre fin à chaque appel dans un délai prescrit.
Formation et éducation du VPR
Depuis plusieurs années, je me sers du logiciel Rosetta Stone pour améliorer mes capacités en français. Pour être parfaitement honnête, je ne suis pas heureux des résultats. Bien que j’obtienne de bons résultats aux examens en ligne de compréhension de l’écrit et de l’oral (je pourrais obtenir des « A »), ma capacité d’écrire et de parler en français demeure exécrable. Un ami m’a recommandé de tenter d’apprendre quelques autres langues pour voir si le problème est linguistique ou individuel. Les résultats ont été étonnants. J’ai appris que j’ai énormément de difficulté à maîtriser les langues latines – français, espagnol italien, etc. Cependant, j’apprends très facilement les langues germaniques et cyrilliques. Si je n’ai jamais pu converser clairement en français, je suis heureux de regarder des documentaires en allemand ou d’enfin comprendre les paroles des chansons de mon groupe préféré de rock alternatif russe.
J’ai par ailleurs suivi le cours Indigenous Canada (Le Canada autochtone) offert par l’Université de l’Alberta (https://www.coursera.org/learn/indigenous-canada). Je le recommande fortement à tous en tant que moyen d’aider à décoloniser notre pays et notre syndicat comme nous-mêmes. Il s’agit d’un programme d’apprentissage en ligne selon un rythme personnel qui comprend 12 modules et qui porte sur l’histoire, la culture, l’art et les traumatismes de nos voisins autochtones. Il raconte sans préjugés et sans crainte la vraie histoire du Canada.
Représentation des membres et problèmes régionaux
Je traite actuellement de 6 cas actifs, dont 4 sont des dossiers dont je m’occupe depuis de nombreuses années. Heureusement, dans la région de l’Atlantique, nous avons de bonnes relations avec la direction et nous sommes en mesure de régler la plupart des problèmes avant qu’ils empirent et fassent l’objet d’un grief officiel.
Malheureusement, les relations avec certains membres de la direction supérieure, et particulièrement la directrice régionale, Opérations en région (DGOR), ne sont pas aussi cordiales. Notre Élément a mis 2 années à programmer une autre réunion du CCPS des Opérations en région. Moins de 48 heures avant la date prévue de cette réunion, la DGOR a annoncé au syndicat qu’elle modifiait unilatéralement la composition du CCPS et qu’elle n’inviterait pas les directrices et directeurs régionaux (DR) à participer à la réunion. Cela va à l’encontre de l’esprit et de la lettre de la loi, mais ce n’est pas du tout étonnant. Au cours de notre réunion d’il y a 2 ans, quand j’ai posé une question directement aux DR, la DGOR a refusé de les laisser répondre. Au cours de cette réunion, la DGOR a fait fi de nos préoccupations, allant même jusqu’à dire que le syndicat avait tort, que le Ministère n’était pas obligé de consulter le syndicat au sujet de décisions opérationnelles et qu’il ne reviendrait pas sur sa décision. En tant que VPR représentant les membres de plusieurs bureaux régionaux très occupés, je trouve déconcertant que la DGOR méprise complètement l’inquiétude du syndicat et, par le fait même, les membres des Opérations en région que nous représentons.
J’ai trouvé très inquiétante la décision de la DGOR de confier le travail de membres du SEAC à des membres de l’IPFPC sous prétexte de « rationaliser » la charge de travail. Le travail en question a trait à l’évaluation et à l’administration de prestations spéciales versées en vertu de la Loi sur la pension. En raison de la décision de la DGOR, plutôt que d’engager davantage de membres du SEAC pour assumer la charge de travail, on a confié le travail aux agentes régionales et agents régionaux des soins infirmiers, qui donneront le travail d’évaluation à contrat. Je m’oppose tout à fait à toute décision donnant lieu à la sous-traitance de travail des membres du syndicat. Malheureusement, la DGOR semble parfaitement heureuse de donner du travail en sous-traitance afin de régler des problèmes de dotation en personnel et de charge de travail.
Conclusion Le travail du syndicat n’est jamais facile ou amusant. J’ai toujours dit que le syndicat le plus efficace est celui qui finit par n’avoir rien à faire. Malheureusement, nous n’y sommes pas encore arrivés. Mon équipe du Canada atlantique est excellente. Les membres des exécutifs des sections locales de la région sont très engagés et dévoués envers les membres qu’ils représentent. Cependant, il reste beaucoup de travail à accomplir. Et à mesure que la situation évolue, au sein du Ministère comme dans le monde entier, la tâche semble parfois augmenter plus rapidement que notre capacité de l’accomplir. Cette semaine, j’ai relu le célèbre poème de William Butler Yeats intitulé « La seconde venue » (https://schabrieres.wordpress.com/2008/10/06/wb-yeats-la-seconde-venue-the-second-coming-1919/). Il comprend une phrase qui m’a toujours glacé le sang : Les meilleurs ne croient plus à rien, les pires se gonflent de l’ardeur des passions mauvaises. Les deux dernières années que nous venons de vivre ont révélé ce que nous avons de meilleur et de pire. Il arrive que tout semble se disloquer. L’anarchie semble se déchaîner sur le monde de plus en plus souvent. Mais je garde espoir. Tant que nous nous serrerons les coudes pour aider les personnes qui ont besoin de nous, nous pourrons travailler ensemble à l’amélioration de notre lieu de travail, de notre communauté et de notre monde, non seulement dans notre propre intérêt ou dans celui de nos collègues mais encore dans l’intérêt de tous, avec équité et justice pour tous.
En toute solidarité,
Le vice-président régional de l’Atlantique,
Edwin MacDonald